C’est dans un carton contenant des archives de ses années d'études d'ingénieur à Paris que Maram Kairé, ingénieur Systèmes & Réseaux, a retrouvé les esquisses et la présentation du projet AQUA qui dormaient dans une enveloppe depuis 16 ans maintenant ! Le principe ? De façon simplifiée, il s'agit de créer un courant assez fort et contrôlé avec l'arrivée de l'eau de mer en appliquant un certain angle d'inclinaison à une canalisation principale : grosso modo, un mini fleuve artificiel dans un tuyau incliné. Ce débit, contrôlé à plusieurs niveaux par un système de robinet/vannes, permettrait d'actionner l'hélice d'une turbine et sa bobine, générant ainsi l'électricité nécessaire au fonctionnement d’une centrale. Toute la performance et particularité de cette technique réside dans la précision de l'inclinaison du tuyau principal d'arrivée de l'eau. Les procédés de désalinisation existent déjà et sont en œuvre un peu partout à travers le monde. Mais une des difficultés constantes reste toujours les besoins en électricité exorbitant pour faire fonctionner la centrale. En rendant autonome l'unité de désalinisation, on réduit drastiquement les coûts de sa mise en place sans affecter ses performances. Ce qui représente un intérêt et des avantages considérables pour un pays comme le Sénégal. L'objectif du projet AQUA était d'expliquer comment installer 5 unités de désalinisation espacées de 100 kilomètres tout le long de la côte quasi-rectiligne entre Dakar et Saint-Louis ; produire suffisamment d'eau potable sur l'ensemble du territoire national avec ces centrales ; générer de l'électricité à partir de chaque unité et alimenter le réseau de la SENELEC ; créer un système de canalisations partant de la côte vers l'intérieur du pays ; créer sur ce réseau des mini barrages permettant de maîtriser la distribution de l'eau pour l'agriculture ; revaloriser ainsi les vallées fossiles grâce au maillage du système d'irrigation ; compenser la durée de l'hivernage et limiter l'avancée du désert au Nord du pays ; et même accroître la production et l'exportation du sel par le Sénégal ! Les avantages pouvant découler d'un tel investissement sont immenses et solutionneraient beaucoup de problèmes liés aux besoins énergétiques. En 2000, le jeune ingénieur présentait son projet à une autorité qui exprima tout son enchantement en promettant de le soumettre au chef de l'État. Depuis ? Plus rien...
Aujourd'hui, l'État a lancé la construction d'une centrale de dessalement à hauteur des Mamelles avec l'accompagnement du Japon. C'est une bonne chose ! Mais il faut aller au-delà, estime Maram Kairé, pour qui le développement du Sénégal passera inévitablement par les sciences et technologies.
Maram Kairé, Le Soleil (Dakar) – AllAfrica